Bergers des âmes au pays des armaillis, Jacques Rime

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Bergers des âmes au pays des armaillis

Editions Cabédita 2014

 

Extrait de Bergers des âmes, pp. 103-105 (à propos du Vieux Chalet de l’abbé Bovet) :

Le Vieux Chalet est un chant profane. Mais ne faut-il pas voir en lui une dimension religieuse? Un journaliste a relevé à l’occasion du centenaire de ce chant que c’était une «véritable parabole pascale» (1) . La dépêche ajoutait qu’il allait être interprété dans le cadre liturgique, lors d’une messe télévisée, après l’homélie. Sa tonalité plutôt grave et méditative le rapproche d’ailleurs d’un hymne religieux. Le chalet, le travail du berger, un prénom si simple (Jean) qu’il devient universel, les éléments dévastateurs symboles de mort, la tristesse, la reconstruction, la joie sont bien des réalités archétypales renvoyant à la vie plus forte que la mort. Durant la Seconde Guerre mondiale, des milliers de soldats internés, vaincus, furent frappés par la chanson lors des causeries-auditions de l’abbé Bovet et en puisèrent du courage (2).

 

L’abbé Bovet a expliqué la genèse de son chant, son désir de composer une chanson sur le thème: «Là-haut, sur nos montagnes, / J’ai mis mon beau drapeau.»(3) Mais la mélodie étant trop simple pour un sujet patriotique, le thème pastoral est venu. Le Vieux Chalet n’est pas une invention de l’abbé. Il s’en explique lui-même: «Il y a, sur le flanc de la Dent de Broc, face à Châtel et à Crésuz, trois chalets qui sont à peu près sur la même ligne horizontale. Or, un de ces chalets est tombé et n’a pas été reconstruit, que je sache. Je ne pense pas du reste que ce soit à la suite d’éboulements ou d’avalanches, bien qu’il y fût assez exposé. C’est celui-ci que j’ai visé dans ma chanson ‹Le vieux chalet.» (4) L’abbé précisait que dans un de ces chalets, il avait conduit des moutons dans sa jeunesse. Les trois alpages en question sont les Grosses et Petites Sciernes (nommés les Vernes par Bovet, sans doute par distraction) ainsi que le Mont de Joux. La localisation exacte du Vieux Chalet n’est pas établie. Il s’agit sans aucun doute du Mont de Joux, mais on hésite si c’est la ruine à côté du nouveau chalet (5) ou si, plus vraisemblablement, il désigne une construction détruite en 1907 placée à quelques centaines de mètres à l’ouest du Mont de Joux, dont on discerne toujours certains restes. (6) -  Editions Cabédita, 2014

Références
(1) Dépêche de l’Agence de presse internationale catholique (APIC), 27 septembre 2011.
(2) Hommage à l’abbé Bovet, 1947, p. 78.
(3) Ibid., p. 76.
(4) Lettre de l’abbé Bovet à Rose Jans, 11 février 1944 (BCU, fonds Bovet, K-91).
(5) Rapport sur les inspections d’alpages en 1990, zone IX: Motélon, Société fribourgeoise d’économie alpestre, pp. 7 et 49.
(6) BORCARD, 1993, pp. 180; 192-193.