Migrilude, la maison d'édition polyglotte

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Des imagiers qui tissent des liens entre langues et cultures

 

 

 

Les éditions Migrilude, à Porrentruy, publient de petits ouvrages multilingues, selon un concept inédit développé par des bibliothécaires en collaboration avec plusieurs illustrateurs.

Tout a commencé à Paris, dans une médiathèque du XIIIe arrondissement, lorsqu’un petit Chinois a emprunté un imagier, composé de dessins et du mot français leur correspondant. Le lendemain, il revenait avec sa maman, désireuse d’apprendre la langue de Molière. Il n’en fallait pas plus pour que la bibliothécaire constate qu’il existe très peu d’outils à disposition des enfants migrants et encore moins pour les aider à acquérir du vocabulaire.

 

C’est ainsi qu’elle a imaginé de créer des imagiers multilingues afin de rendre service aux jeunes immigrés, mais aussi pour tisser des liens entre les différentes langues et les différentes cultures.

S’il existait déjà des imagiers bilingues, c’est une démarche complètement inédite, tant sur le fond et la forme, qui est née ce jour-là dans la capitale française. Aucun éditeur n’avait jusqu’alors pensé à développer des imagiers réunissant les dix langues les plus répandues en Europe.

 

 

 

L'imagier Plurilingue, 1 2 3

 

 

Albanais, allemand, anglais, arabe, espagnol, français, italien, kurde (kurmandji), kurde (sorani), mooré, polonais, portugais, serbe, somali, tagalog, thaï, turc.

A travers des jeux et des activités d’observation dirigées, L’Imagier plurilingue invite les enfants à se questionner sur la diversité linguistique et culturelle tout en découvrant les objets de la classe, déclinés en 17 langues, ainsi que les chiffres de 1 à 12.

Il permet de valoriser les langues d’origine des élèves et de développer des attitudes positives envers elles. L’Imagier plurilingue a été conçu par des enseignantes de l’école maternelle/enfantine praticiennes de l’Eveil aux langues, sur la base des langues présentes dans leurs classes, en collaboration avec des spécialistes de l’éducation interculturelle. Les cartes du jeu ont été réalisées par leurs élèves. Les traductions et la bande sonore du CD ont été assurées par les parents des élèves et des usagers de la bibliothèque interculturelle de la Croix-Rouge.

Grâce à une approche simple et progressive, cet outil est utilisable par tout enseignant, parent ou médiateur socioculturel qui souhaiterait pratiquer des activités langagières à l’école, à la maison ou en bibliothèque. 

 

 

 

Mon Jardin des langues

 

 

Fruit d’un projet pédagogique mené par le service Enseignement de la Ville de Guebwiller, les éditions Migrilude de Porrentruy et le Centre de documentation pédagogique (CRDP) de Strasbourg, cet imagier a été réalisé par les élèves d’écoles bilingues enfantines de la ville de Guebwiller.

L’illustratrice Anne Lefebvre a guidé les élans artistiques des enfants, Richard Ledermann, spécialiste des langues alsacienne et germanique est intervenu pour le travail linguistique, le CRDP a assuré les enregistrements. Le résultat est à la fois graphique et pédagogique.

Les linguistes et les pédagogues en langues l’affirment : c’est en favorisant le bilinguisme et le plurilinguisme que les enfants développent des compétences dans leur(s) langue(s) maternelle(s) et une compréhension fondamentale des autres langues.

 

 

 

Des outils de masse destinés à combler une lacune

 

 

Des outils de masse destinés à combler une lacune Enthousiasmée par le projet de sa collègue permettant à la fois de mettre à disposition des enfants un outil de masse et de combler une lacune dans les médiathèques, la bibliothécaire française Virginie Picardat s’y est rapidement associée. Travaillant depuis le début de l’année à Porrentruy, elle a développé ce projet éditorial à coté de son activité professionnelle pour diffuser deux premiers imagiers multilingues, consacrés à la fête de Noël et aux ustensiles de cuisine.

«Notre but est de développer une véritable collection. Les prochains volumes traiteront de la salle de bains, des animaux, de l’école, de tout ce qui tourne autour du livre, des couleurs et des fruits», explique l’éditrice. Elle précise: «Ces imagiers sont aussi une manière de militer, car, lorsqu’on observe les récentes votations sur le renforcement de la loi sur l’asile et les étrangers en Suisse, il y a de quoi s'inquiéter!».

 

 

 

Un accueil enthousiaste

 

 

«Une enquête menée dans plusieurs bibliothèques françaises a confirmé qu’il y avait une véritable demande pour ce type d’ouvrages», se réjouit Virginie Picardat. Elle a également pu observer que, même dans les classes allophones, les enseignants disposent de peu d’outils et doivent donc déployer des trésors d’imagination pour en concevoir de nouveaux. L’étude de marché a démontré, notamment chez certains Arabes de la 2e génération établis en Europe, chez certains Alsaciens et habitants des Pyrénées, une volonté de transmettre leur langue maternelle à leurs enfants. Les imagiers multilingues permettent enfin de répondre au voeu des parents qui souhaitent que leurs enfants apprennent une autre langue de plus en plus tôt. «Ces petits ouvrages sont un éveil à l’autre à travers sa langue et les mots», note Virginie Picardat, en soulignant qu’ils peuvent être abordés et utilisés de différentes manières, comme l’ont démontré les tests effectués ces dernières semaines avec des bibliothécaires jurassiens et les personnes se rendant régulièrement au Centre d’animation et de formation pour les femmes migrantes à Porrentruy. Tous leur ont réservé un accueil enthousiaste.

 

 

 

Aptes à satisfaire des demandes très diverses

 

 

Ainsi, chaque imagier, conçu par Virginie Picardat, présente entre 20 et 30 mots, tous traduits en français, anglais, allemand, arabe, italien, espagnol, portugais, turc, russe et chinois. Chaque langue est toujours identifiée par la même couleur. Au début de l’ouvrage, une histoire écrite en dix langues à partir des mots présentés donne un fil conducteur pour ceux qui le souhaitent. Ces livres s’adressent aussi bien aux enfants apprenant à lire dans leur langue maternelle qu’à ceux débutant l’apprentissage d’une autre langue, en passant par les familles bilingues ou trilingues désireuses de valoriser leurs langues et tous les curieux et amoureux des mots et des langues.

«Les autres langues éveillent également la curiosité face aux différentes graphies et exercent la mémoire visuelle de l’enfant», signale l’éditrice. Selon elle, la diversité des langues et des écritures est aussi un encouragement à l’ouverture aux autres cultures et plus largement aux autres.

 

 

 

«C’est un galop d’essai»

 

 

«Les imagiers peuvent se lire à plusieurs, chacun prononçant sa langue afin de valoriser les échanges», relève Virginie Picardat, avant d’insister sur le fait que les étrangers sont valorisés, car ils peuvent lire et expliquer comment se prononce leur langue. C’est notamment pour cette raison qu’elle a renoncé à graver un CD pour faire découvrir les différentes prononciations. Les Editions Migrilude sont nées d’un mélange des deux vocables migration et ludique. Leurs deux premiers ouvrages ont été tirés à 2000 exemplaires chacun. «C’est un galop d’essai», termine l’éditrice. Pour ses deux premiers imagiers, elle a noué des collaborations avec les illustrateurs français Nguyen Thi Chi Lan et Anne Lefebre.

Article de Thierry Bédat issu du Quotidien Jurassien du 24 octobre 2006

 

Depuis la collection s'est enrichie de nombreux titres.

 

Les imagiers multilingues des éditions Migrilude sont disponibles
aux éditions Migrilude
Case postale 111
2900 Porrentruy
tél. et fax: 032 466 25 14
Site internet: www.migrilude.com